J'ai récemment eu l'occasion de jouer un instrument de 2009 de cet excellent luthier marseillais, puis j'ai ressorti cette guitare "vieille" de plus de 20 ans et j'ai été frappé par la très grande continuité entre son travail de l'époque et celui d'aujourd'hui. Elle n'a pas vieilli d'un pouce malgré l'accident que lui avait occasionné la chute qu'elle avait subie aux mains de son premier propriétaire, après la réparation effectuée par le luthier lui-même.
Ses guitares faites en épicéa arborent une sonorité tout à fait particulière dont je n'ai jamais trouvé l'équivalent ailleurs. Elles justifient parfaitement leur prix élevé, eu égard au soin prodigué lors de leur construction et la finition irréprochable dont elles bénéficient.
Au-delà du comportement lisse et contrôlé, et de la clarté des registres, je qualifierais cette sonorité de pleine, concentrée, ronde, voire "crémeuse", à l'extrême opposé aussi bien de la sonorité madrilène plus creuse, que de celle des instruments des luthiers français (y compris ceux de son ami très couru Dominique Field et malgré leur caractère soyeux que l'on peut mettre en évidence si on sait les faire parler avec doigté). En fait, cette guitare me permet d'exécuter sans effort un legato "pianistique" très chantant que j'ai du mal à obtenir sans un effort gigantesque sur d'autres instruments.
Paradoxalement je constate que les bonnes Contreras I doble tapa en épicéa à barrage incurvé elles aussi, possèdent malgré tout cette rondeur et cette légère introversion en commun, avec a contrario davantage de brillance et de sucré dans les aigus avec une tendance à la friabilité à fort volume et un médium un peu nasal.